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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
15 décembre 2018

Résumé Bedous-café-philo - 05/01/19 - Sagesse de la douleur ?

Bedous café-philo_modifié-1

Le prochain Café-Philo-Bedous se tiendra samedi 05 janvier 2019 comme d'habitude au café L'escala à 18h en vallée d'Aspe (Bedous). Le sujet proposé pour cette soirée sera :

 Y-a-t-il une sagesse de la douleur ?

  Ce sujet a été inspiré par le vers de C.Baudelaire, issu du poème “Recueillement”: “sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille”. Le mot douleur vient du latin dolere, avoir mal, être affligé, de dolus, la ruse, qui a donné le deuil.; Il semble être synonyme de souffrance et leur opposé habituel est le plaisir, plaisir que Baudelaire, dans son écrit, compare à un “bourreau sans merci”...
     Mais, souffrance et douleur sont-elles identiques , ne peut-on tenter de penser une différence ? Ce que nous pouvons constater, c’est que les humains ont depuis longtemps questionner cette expérience de la douleur et les mythes ancestraux tentent de lui donner une origine (par ex., celui de Pandora dans les écrits d’Hésiode), comme si cette épreuve était le lot commun de tous les humains, inévitable et cependant semblant injustifiable. Mais si douleur/souffrance amoindrissent l’homme dans son intégrité et ses capacités jusqu’à le désespérer, peut-on entendre l’idée d’une sagesse de la douleur ? Peut-on en penser une positivité ? Que pouvons-nous y rencontrer et si sagesse il peut y avoir, laquelle ?
 
    La réflexion s’engage sur une possible différence entre douleur et souffrance. Tout le monde semble s’accorder sur le fait qu’elles s’opposent au bonheur et qu’elles ne sont pas identiques. La douleur, selon certains , est de l’ordre du physique, ce que le corps ressent , là où la souffrance serait psychique , de l’ordre du sentiment, impalpable. Mais, on objecte que certaines expériences(perte d’un être  cher) sont des douleurs. On en vient alors à l’idée que la souffrance est ce que le sujet fait de la douleur( le ressenti de la douleur et comment il s’exprime, le mot faisant penser au souffre, au feu qui brule, au diable...) ) et qu’elle est donc relative , chacun n’ayant pas les mêmes armes face à cette expérience On interroge alors le rapport au temps , avec l’idée qu’elles n’ont pas la même temporalité. La douleur serait reconnaissable, la souffrance invisible  et c’est le sujet qui fait de la douleur une souffrance.  A quel moment la douleur devient-elle souffrance ? La douleur peut disparaitre et la souffrance peut cependant perdurer( donc là, pas de sagesse). Ainsi, au-delà de la douleur qui n’est plus, la souffrance dit quelque chose de nous. Mais, n’y a-t-il pas des douleurs( par ex. dans la passion amoureuse) qui créent une souffrance qui nous dépasse, qui touchent au statut de l’humain. Ne peut-on dire que le deuil est ce qui nous fait accéder à notre statut ?
 
  On interroge alors l’insupportable de la douleur ? pourquoi ? qu’est-ce que cette expérience ? Quelqu’un constate que chez l’enfant et l’adolescent, la douleur est comme décuplée . Elle serait le signe qu’il y a un chainon manquant entre soi et l’univers et la sagesse de la douleur serait un protocole que l’on trouverait pour combler ce chainon manquant. S’il y a une sagesse , c’est alors la tentative de régler, de gérer sa douleur. Ainsi, nous n’avons pas de ‘kit’' de survie psychique”,et c’est là qu’intervient la subjectivité.  La réflexion s’engage alors sur la question de l’autre parce qu’on constate que on peut  se réfugier dans l’isolement, que l’on est seul avec soi-même et qu’il peut y avoir de l’orgueil à ne pas demander de l’aide( le danger serait qu’elle nous retire du monde mais quel retour ?). C’est peut-être parce que cette expérience suppose d’accepter d’être démuni , elle nous fait connaitre l’acceptation. Il peut aussi y avoir un danger qui consisterait à faire de la victimisation et la sagesse refuserait de tenir ce rôle ou encore un danger de légitimation de la douleur et quelqu’un rappelle cette phrase : “l’homme est un apprenti, la douleur et son maitre” . La douceur serait alors bienvenue pour ne pas faire l’apologie de la douleur et nous constatons qu’une seule lettre sépare les deux...
 
    Le danger de la douleur serait avant tout qu’elle ne s’exprime pas(le corps est capable de s’anesthésier longtemps et un jour  tombe malade sans que l’on sache  pourquoi) et c’est quand elle commence à parler, quand nous en prenons conscience et que nous l’acceptons que nous pouvons espérer en faire quelque chose. Elle nous alerte sur quelque chose, comme un phare, une lumière .D’ailleurs, on peut volontairement choisir de souffrir pour s’améliorer, pour la supporter mieux et l’exemple des arts martiaux est évoqué. Si la sagesse évoque la connaissance, la maitrise ou encore la métamorphose,  elle a à voir avec une transformation et il n’y a que cela qui peut nous sortir de la souffrance. Quand on ne reste que centré sur soi, on continue à souffrir et il manque peut être l’estime de soi pour éviter de devenir un martyr. Il y a donc un danger à ne pas résister à la douleur et elle est aussi une question de regard (  Face à la torture, porté par un idéal, l’homme peut résister). Elle peut devenir un moteur pour se transcender. Cependant, il n’y a aucune nécessité de vivre la douleur pour devenir sage et chacun s’accorde avec l’idée que le manque que nous avons devrait être rempli par autre chose.  Mais, si elle est inévitable dans une vie humaine, elle nous invite à accepter notre finitude, à nous transformer , faisant ainsi l’expérience d’une vertu qui se nomme courage ainsi que d’une possible liberté. Elle rappellerait à l’humain qu’il peut être une créateur, à commencer par lui-même.
 
   Enfin, quelqu’un souligne comment cette expérience nous rappelle le bonheur de vivre sans souffrance, nous enseigne que ce n’est pas un dû de ne pas avoir mal, nous fait alors éprouver le bonheur de vivre au jour le jour,  nous invite à une autre temporalité. La douleur n’est pas une quête, la sagesse, si, et s’il y a une sagesse de la douleur , elle nous ouvre à une autre altérité nous permettant de repérer la souffrance de l’autre, de l’aider à progresser, dàse dépasser en se réinventant, à mourir à soi(deuil)  pour devenir, nous unissant à l’humaine condition , universelle et intemporelle: “être poète, c’est donner à notre douleur la force et les moyens de se dépasser, de devenir aussi la douleur de tous,y compris de la poésie elle-même”( Franck Venaille).
Pour Métaphores, Véronique Barrail

 

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Commentaires
D
Précisément, merci pour ces deux précédents commentaires. La "grande souffrance" ne peut faire sens qu'à la condition qu'elle soit reconnue comme telle par le sujet à partir d'une nouvelle hiérarchie moins serve, moins soumise, moins engoncée dans la tristesse de l'expérience. Le travail de métabolisation psycho-corporel est essentiel pour permettre un redéploiement actif. Encore faut-il pouvoir aborder la vérité de la souffrance et les affects passifs qui l'accompagnent dans la représentation (pensée, souvenir, récit, imagination etc.) sur un mode traumatique. A l'évidence, ce travail n'est pas possible pour tout le monde comme le notait déjà Spinoza en son temps.
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G
Voilà un témoignage émouvant qui montre bien que la douleur, à elle seule, ne donne ni force ni sagesse. Pour accéder à ce stade il faut manifestement quelque chose en plus qu'on ne trouve pas toujours en soi-même, et qui parfois se construit dans un travail à deux ou à plusieurs. C'est là que la thérapie peut apporter souvent ce qui manque.
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S
Il est difficile de « théoriser » sur la douleur, il me semble que tous les mots tombent à côté de la plaque des plus grands maux de l'existence.<br /> <br /> <br /> <br /> Lorsque l’on souffre terriblement dans son corps, cela entraine une sorte d’aphasie, d’impossibilité de traduire par le langage l’intensité de la douleur. Le médecin peut juste observer le patient mais en aucun cas il ne peut SAVOIR/CONNAITRE le degré de la souffrance.<br /> <br /> <br /> <br /> Des signes peut-être…Celui qui souffre vraiment, ne bouge pas, il se recroqueville et se met en position de fœtus. Cette immobilité forcée vous donne accès à ce qu’il y a de plus précieux en vous : un instinct de survie ou à quelque chose qui ne peut pas s’éteindre, non c'est impossible, qui résiste si fort parce que cela touche votre propre humanité…<br /> <br /> <br /> <br /> Est-ce une forme de sagesse ? Je ne le crois pas. <br /> <br /> En revanche, cette expérience vous modifie profondément. La réalité n’est plus jamais la même, pire ou mieux, vous ne serez plus jamais le même. <br /> <br /> <br /> <br /> Faut-il s’en réjouir ? <br /> <br /> <br /> <br /> "Tout ce qui ne tue pas me rend plus fort » hum, certes mais jusqu’à quel point ?
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G
Il serait bon, me semble-til, de rappeler les Quatre Nobles Vérités de Bouddha: nature de la souffrance, origine de la souffrance, cessation de la souffrance, moyens de parvenir à la cessation de la souffrance. La souffrance est une donnée universelle de la condition humaine : elle conditionne l'accès à la sagesse, mais ne saurait conduire mécaniquement à la sagesse. Il y faut très évidemment un travail de l'intelligence.
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D
Nietzsche distingue "petite" et "grande" souffrance. La première est absorbée par le moi, digérée pour maintenir l'équilibre et l'homéostasie. Elle ne change pas grand chose. La seconde fait irruption dans la structure psychique, introduisant ou révélant la faille inhérente au fait de vivre, déstructurant une hiérarchie installée depuis longtemps. C'est dans l'expérience de la "grande" souffrance que de nouveaux agencements sont rendus possibles, de nouvelles questions, de nouveaux itinéraires existentiels.<br /> <br /> La grande souffrance place le sujet face à l'abîme, au plus près de la vérité là où se jouent pour lui sa propre exigence vitale et son désir de vivre. C'est souvent à cette occasion que la question de la santé (et de la lutte qui l'accompagne) devient essentielle. La santé n'est évidemment pas étrangère à la sagesse...
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