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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
10 février 2018

Résumé Café-philo - 13/03/18 - Rechercher la beauté ?

CAFE-PHILO (2)

Le CAFE-PHILO du mois de  mars (activité libre et gratuite) s'est tenu le mardi 13 à 18h45 au Palais Beaumont. Le sujet voté par les participants présents fut : 

Y a-t-il nécessité à rechercher la beauté ?

Résumé de la soirée :

1)   Existe–t-il « la beauté » ou seulement des choses, des œuvres belles ? Si la beauté en soi est introuvable, nous n’en faisons pas moins l’expérience, sous les espèces de l’émotion esthétique, de la sensation de plaisir, voire de l’extase (le syndrome de Stendhal). Expérience essentiellement individuelle, même si la beauté est régulièrement codifiée, normée par les institutions, les écoles et les traditions. Second paradoxe : si chacun est souverain dans le domaine de l’appréciation esthétique, l’idée de beauté est en elle-même universelle, comme référence, comme valeur, alors même qu’il n’existe pas d’accord universel sur la qualité de telle ou telle œuvre artistique, voire sur les beautés de la nature. Ces deux paradoxes (social-individuel ; subjectif-universel) sont indépassables, et creusent dans cette question un véritable abîme de perplexité.

2)   On relève qu’il y a bien des différences entre l’agréable, le joli, le beau et le sublime. Dans le beau il y a un élément, au-delà de la proportion, de l’harmonie, qui inquiète : «  le beau c’est ce qui désespère » (Valéry) ou de Breton : « la beauté est convulsive », expressions d’artistes qui témoignent là, d’intimité, de l’ « effroi du beau ». La beauté intimide parce qu’elle rend sensible l’écart entre la quotidienneté, la médiocrité, la banalité, la trivialité, et cette perfection à la fois offerte et refusée, accessible et inaccessible.

3)   Quelle nécessité nous pousserait à rechercher la beauté ? Plusieurs personnes évoquent la joie, l’intensité nouvelle qui transporte l’âme, qui dynamise la vie, comme un appel à une dimension supplémentaire, une certaine qualité de bonheur qui exige d’être communiquée et partagée. « Supplément d’âme » ? La beauté est du côté des forces de vie, la laideur des forces de mort.

4)   D’autres insistent plutôt sur le don de sens – à entendre à la fois comme sensualité, sentiment et comme signification. Mais quelle signification ? L’œuvre parle, parfois elle crie, créant une résonance mystérieuse et intime entre celui qui crée et celui qui contemple : accord qui ne relève d’aucune obligation ni contrainte, mais plutôt d’une « nécessité » toute subjective, à la fois libre et impérieuse. C’est pourquoi l’expérience esthétique est de l’ordre de la rareté – relative, car si pour certains, comme l’artiste, elle est vitale à sa création, elle peut être tout à fait exceptionnelle pour d’autres, ou quasiment absente.

5)   Un participant, dans un bel élan philosophique, déclare que pour lui la beauté est un psychotrope, autrement agissant que les substances chimiques. Un psychanalyste contemporain (Julia Kristeva) dirait : un contre-dépresseur. Remarque précieuse : sans psychotrope, quelles qu’en soient les modalités, que deviendrait la vie ? Songez à ce que dit Baudelaire de l’ « ivresse ».

6)   Reste que l’on assiste aussi, hélas, à un dévoiement public de l’usage de la beauté, au service de la publicité, du marketing, de la consommation, et de l’idéologie. C’est aussi un marché, et un enjeu politique et idéologie. Pensez aux artistes embrigadés de force au service de l’Etat ou du Parti.

7)   Concluons : il y a bel et bien une nécessité à rechercher la beauté, plus encore à la trouver : dans le spectacle de la nature (qui a aussi ses laideurs), dans les arts, dans les personnes, et parfois même dans la quotidienneté. Expérience précieuse, intime, réconfortante, apaisante ou dynamisante, allègre et heureuse, mais non sans un certain coefficient d’étrangeté et de distance. Si la beauté s’abaisse trop vers nous elle confine à la joliesse et perd aussitôt sa qualité propre. Il est bon que ce qui est précieux soit également rare.

Pour Métaphores, Guy Karl

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Commentaires
D
C'est bien là l'autre partie de l'expérience esthétique du beau, et sa réception "affective" qui excède l'intelligence. Je m'en suis tenu à l'écart, divisant cette expérience esthétique afin d'en appréhender la variété. Percevoir "le beau", le sentir, s'en émouvoir, sont des actes différents mais qui dans l'expérience esthétique sont entremêlés. <br /> <br /> J'esquisse une sortie de l'impasse explicative de l'appréhension du beau : non pas l'expliquer, à peine le dire, mais le montrer, voire le manifester.
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G
Dans la jouissance - esthétique par exemple, mais pas seulement - "j'ouis sens", pour parler comme Lacan, mais d'un sens qui excède tous les sens (signification) en faisant chavirer les sens (sensoriels et émotionnels). C'est une dimension que nous avons trop oubliée dans nos débats, et dans les commentaires qui ont suivi. Notons que les auteurs classiques ne l'ont pas signalé non plus, sauf Stendhal qui en parle d'expérience.
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H
Nous percevons le monde extérieur avec nos sens , qui dépendent de processus physiologiques , biochimiques souvent inconscients , et l'extraordinaire est de pouvoir transcrire tout cela en mots , Nos sens reçoivent des formes d'énergie du monde extérieur ,et reconnaissent le plaisir et le déplaisir et le beau le laid l'amer le sucré ; En dehors des mots , il ne reste que le cri ,celui de la douleur , et celui de l'extase ; quant aux"" mots"" cherchons les ailleurs ; dans l'inénarrable .
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D
Recherche insoluble; terme quasiment indéfinissable...<br /> <br /> Dans son article Beau de l'Encyclopédie, Diderot passe en revue un bon nombre de théories sur le beau de Platon jusqu'à lui, et en montre non seulement les insuffisances mais surtout, à chaque fois, l'incomplétude. Et il admet que son approche présente quelques difficultés. <br /> <br /> Comme vous le dîtes pendant cette soirée, le beau rassemble des contraires : universel/particulier, collectif/individuel... Ce que nous percevons si bien comme beau ou belle est irréductible à nos propres catégories. <br /> <br /> Ce qui est très "beau" justement...<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce bel échange cher Guy.<br /> <br /> <br /> <br /> David
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G
Hume écrit : "la beauté est un ordre une combinaison de parties, tels que, par la constitution primitive de notre nature, par accoutumance ou par caprice, elle est propre à donner à l'âme un plaisir et un contentement". Le beau apporte du plaisir, le laid de la douleur. - cela est vrai sans doute, mais un peu court : Hume ne dit rien de la qualité spécifique du beau - mais il est bien vrai qu'elle 'est quasiment indéfinissable
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