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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
16 février 2019

Résumé Apéro-philo - 21/03/19 - Envie et jalousie

Apero philo

L'Apéro-philo du mois de mars, activité libre et gratuite, s'est tenu le jeudi 21 mars 2019 à 18h45 au café-restaurant Un Dimanche à la campagne sur le sujet suivant : 

Envie et jalousie : les deux mamelles du malheur

Résumé de la soirée :

Envie et jalousie, deux passions tristes qui font souffrir, qui sont peut-être la racine, ensemble, des autres passions tristes qui font le malheur de l’homme.

Envie : du latin invidia – qui vient de invidere : voir, regarder, fixer les yeux sur, regarder de travers. Invidia c’est la malveillance de celui qui regarde chez autrui un bien qu’autrui possède et qu’il voudrait posséder. D’où l’avidité, la malveillance, l’inimitié, la haine, la colère, la destructivité. L’envie est une passion de l’avoir (avidité) avec une composante agressive : ravir l’objet à l’autre, ou détruire l’objet pour en priver l’autre. L’envie est la première passion, la plus archaïque, liée à l’expérience de la frustration. Apprendre à la gérer est une condition essentielle de la maturation psychique.

Jalousie, déformation de zelousie, latin zelusos – de zèle. Avoir le zèle de défendre son bien. Passion de la possession exclusive, de l’appropriation et de la garde de l’objet aimé. Le jaloux veut garder la mainmise exclusive sur l’objet aimé.

Si l’envie s’inscrit dans une relation duelle, où le sujet se réfère à l’autre qui possède pour lui ravir son bien, la jalousie apparaît dans une relation triangulaire. Le jaloux veut empêcher le rival d’avoir accès à la personne aimée. Il souffre sitôt que l’aimé marque quelque intérêt pour le tiers. Le modèle de cette relation se trouve d’abord dans la jalousie fraternelle où frères et sœurs se déchirent pour la possession (fantasmatique) de l’amour de la mère ou du père. Caïn et Abel, avec le thème du fratricide. Egalement les querelles lors des questions d’héritage, où l’on voit revenir les conflits les plus archaïques.

La jalousie amoureuse, mieux connue, et souvent traitée au cinéma et en littérature, présente à nouveau la figure du trio dramatique. On remarquera que le rival, considéré comme la cause du malheur, fait aussi l’objet d’une sorte de fascination névrotique. La haine qu’il suscite peut cacher un attachement inconscient, une sorte de passion ambivalente, parfois meurtrière. On s’avoue difficilement jaloux, on opère une sorte de dénégation. C’est que la jalousie est la marque d’une faiblesse du moi, qui ne se sent consistant que par la garde, la possession de l’objet d’amour. Son départ, ou même qu’il s’intéresse ailleurs, est vécu comme une catastrophe psychique. La jalousie dénote la dépendance.

Envie et jalousie, dans la réalité concrète ne sont pas toujours faciles à distinguer, mais, formellement, elles correspondent à deux étages différents de l’évolution psychique. L’envie s’enracine dans la période orale (Mélanie Klein). La jalousie correspond à la découverte du tiers comme rival, et s’écrit dans la triangulation fraternelle ou amicale, ou amoureuse, voire professionnelle. A ce titre on ne voit pas comment on pourrait éviter d’en faire l’expérience. Pour autant cette expérience ne se fait jamais sans douleur, et apprendre à la dépasser est en quelque sorte une obligation majeure pour accéder à une certaine autonomie.

Pour Métaphores, Guy Karl

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Commentaires
D
Peut-on se libérer des mamelles archaïques, de leur dimension fantasmatique, de l'imaginaire qui conditionne un certain type de rapport et qui structure ces deux affects tristes que sont envie et jalousie ? <br /> <br /> <br /> <br /> On peut mettre l'accent, au delà de la seule dimension psychologique de la question sur un aspect socio-culturel et même économique de ces affections. <br /> <br /> <br /> <br /> L'envie n'a pas une signification strictement privée si on la rapporte à son processus d'apparition. Elle prend sens dans le grégarisme mimétique, dans les conduites d'imitation, dans le désir pour le désir de l'autre que Spinoza, puis Hegel et René Girard ont pensé et élaboré. L'envie n'est pas liée à un objet (tel parfum, voiture etc.) mais au fait que cet objet puisse être convoité par le désir de l'autre. Le mécanisme publicitaire stimule, encourage, accélère l'envie en jouant sur le ressort mimétique. Il y a là une production capitaliste de l'envie reposant sur une ignorance entretenue des causes qui déterminent le désir et tiennent le sujet à l'écart de son propre désir - désir qu'il s'agit d'aliéner à des images vaines mais efficaces économiquement. <br /> <br /> On peut considérer l'envie comme l'expression d'un "biopouvoir" déterminé par des intentions identifiables. <br /> <br /> <br /> <br /> La jalousie peut elle se comprendre comme la rançon d'une pathologie culturelle essentiellement religieuse à savoir la glorification de l'amour et la fidélité qui est censée l'accompagner mais qui demeure absolument contraire à la vie psychique. Voilà un joli programme de mortification que les grecs avaient déjà pensé comme délire de l'imagination ou comme expression de "désirs non naturels et non nécessaires" (Epicure). L'amour comme valeur n'est-il pas le meilleur moyen d'entretenir une névrose de la fusion et une résistance pathologique à toute forme de séparation, toute forme de lâcher prise relationnel et dont la jalousie serait l'excroissance dramatique ? <br /> <br /> Ce ne sont là que des pistes... qui réorientent possiblement le débat dans des directions plus philosophiques et critiques.
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