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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
12 août 2017

Résumé du Café-philo - 13/09/17 Optimisme et pessimisme

CAFE-PHILO (2)

Le CAFE-PHILO du mois de septembre (activité libre et gratuite) s'est tenu le mercredi 13 à 18h45 au café-restaurant un Dimanche à la campagne

Après propositions et vote le sujet retenu par l'assemblée fut : 

Le pessimiste est-il un optimiste mieux renseigné ?

Résumé : 

1)   L’optimiste voit le meilleur, l’optimum ; le pessimiste voit le pire, pessimum. Deux appréciations fortement contrastées de la vie et du monde. On remarque d’abord qu’il s’agit de dispositions fondamentales, d’humeur, d’idiosyncrasies (dispositions subjectives), de tonalités affectives qui colorent le monde d’une certaine façon, en blanc ou en noir. Si ces dispositions peuvent varier en fonction des circonstances et des événements, chez le même sujet, on ne dira de quelqu’un qu’il est optimiste ou pessimiste que s’il manifeste une certaine régularité dans ses appréciations, dans un sens ou dans l’autre. Le pessimiste est porté à juger de tout sous l’angle du pire, l’optimiste privilégie l’aspect « positif », estimant par exemple que « tout finit toujours par s’arranger » - Ce qui n’est pas faux, cela s’arrange toujours d’une certaine manière – qui peut être la pire !

2)   La question devient : quels sont les fondements respectifs de ces deux attitudes qui étonneront l’observateur par leur caractère global, répétitif, unidimensionnel, voire sectaire, résistant manifestement à toute objection rationnelle. Pensées systématiques, jugements prévisibles et redondants qui doivent trouver leur source dans l’affectivité plutôt que dans la raison. « La raison est ployable à tous sens « disait Pascal. C’est dire que ces attitudes ne sont en rien des jugements « renseignés » mais des expressions irrationnelles du sentiment qui se déguisent en jugements pseudo rationnels. Ce sentiment lui-même, irrationnel par nature, prend sa source dans des expériences émotionnelles, dans les événements marquants d’une histoire, dans l’éducation, les modèles parentaux et sociaux, ce qui explique leur constance et leur quasi indestructibilité, même devant les démentis incontestables de la réalité.

13 09

3)   Deux « visions du monde ». L’optimiste peut paraître béat, inconscient, mal renseigné, fermant les yeux sur certains aspects déplaisants de l’existence. Il veut un ordre sensé, donc il voit un ordre sensé. Le pessimiste, qu’un participant traite plaisamment de « trouillard névrosé », voit aussi un ordre, mais un ordre calamiteux où les choses ne s’arrangent pas, et ne s’arrangeront jamais. Le pire est sûr, voilà au moins une certitude ! Le pessimiste est-il « mieux renseigné » ? Il dira qu’il est lucide, clairvoyant, dés-abusé, voyant les choses comme elles sont. On songe à Alceste dans le Misanthrope qui se fait fort de n’être pas dupe. On se demandera ce que redoute Alceste, et le pessimiste en général. Peut-être, horreur, de voir son désir satisfait ? A considérer de plus près ces deux positions systématiques, optimisme et pessimisme, elles nous apparaissent bientôt comme également absurdes, procédant d’une lecture unilatérale et tronquée, expressions émotives et passionnelles d’un « pathos » de joie ou de tristesse. Chacun en jugera comme il veut, il préfèrera l’une ou l’autre – selon son propre pathos – mais cela ne fera que répéter et approfondir la confusion dont nous cherchons à sortir. (Je note que le groupe a bien du mal à se dégager du poids de l’opinion, et retombe régulièrement dans les ornières du relativisme).

4)   Si l’on veut reprendre la question sous l’angle philosophique on se proposera de sortir de l’opposition stérile des attitudes, prises de position et jugements a priori, renvoyant dos à dos des conceptions qui n’en sont pas, dénonçant le piège des « conceptions du monde » qui ne sont que des projections issues de l’inconscient. On ne se demandera pas s’il vaut mieux être ceci ou cela, s’il faut trouver une synthèse des deux, et autres farines. On se demandera plutôt s’il est vrai qu’il existe un ordre heureux ou malheureux, si cette notion d’ordre est fondée en connaissance. S’il est bien vrai que notre pensée cherche un ordre (voyez le cosmos des Grecs), rien ne garantit que cet ordre existe, et encore moins qu’il soit tel que nous le voyons.  De même pour le sens.

5)   C’est ici que l’opinion et la philosophie se séparent : l’opinion veut et voit de l’ordre et du sens pour le confort et le bien–être de la vie, la philosophie questionne selon l’exigence de vérité. Où l’on soupçonne que le bonheur immédiat et la vérité ne se rencontrent que dans les livres pieux.

Pour Métaphores,

GK

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Commentaires
M
Magnifique commentaire, Hakeim, fort bien renseigné...
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H
Merci cher Démocrite pour ces précisions ! Celui qui n'a pas enquêté n'a pas droit à la parole disait Mao , Mais comment enquêter dans ce monde réel et un monde rêvé ? Parler de pessimisme c'est rentrer dans le vestibule des croyances et de l'ignorance , alors que nous sommes tous sur une balançoire qui va tantôt vers le monde réel et tantôt vers un monde idéal Cinq siècle avant JC Buddha pensait déjà comme Schopenhauer N'était il pas le Maître de l'optimisme averti ?<br /> <br /> Ni rire ni pleurer mais comprendre oui , et après ? Comprendre voudrait dire appréhender la Vérité ? Il faut enquêter un peu plus .Je n'ai pas tout compris et ne pas tout comprendre c'est rester en dehors du monde réel ; ce monde de l'absurde , ce monde du pathos où beaucoup de choses ne sont que des vanités<br /> <br /> Parfois il faut être borné pour survivre et se dire comme Hemingway qu'un homme ça peut se détruire , mais jamais être vaincu (Le vieil homme et la mer )<br /> <br /> ""Mais pourquoi organiser un garden- party alors que le monde s'écroule ""dit un personnage dans un roman oublié ?<br /> <br /> En vous remerciant
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D
Il faut distinguer le pessimisme spontané et le pessimisme philosophique.<br /> <br /> Comme nous l'avons abordé ce soir-là, la conscience philosophique débute par l'expérience du pire, par un trou dans la représentation que le réel rend possible par sa dureté même. Schopenhauer note dans Le Monde que "c'est la connaissance des choses de la mort et la considération de la douleur et de la misère de la vie qui donnent la plus forte impulsion à la pensée philosophique". Et plus loin, "si notre vie était sans douleur il ne viendrait à personne de se demander pourquoi le monde existe..."<br /> <br /> Voilà pourquoi l'optimisme peut se comprendre comme l'attitude la moins renseignée, la plus enfermée dans une représentation colmatée par le principe de plaisir et l'illusion qui l'accompagne, attitude la moins philosophique qui soit.<br /> <br /> <br /> <br /> De fait, le pessimisme renseigné est d'abord conscience du pire, conscience de la tragédie de la vie et de l'implacable que perçoit tout esprit lucide. <br /> <br /> Sommes-nous pour autant condamnés au pessimisme ? Epicure, Spinoza et Nietzsche n'éradiquent pas la morsure du réel mais n'enferrent pas pour autant la représentation dans un jugement doloriste voire masochiste. Si tout passe (Héraclite), alors la création devient possible et avec elle l'affirmation de sa puissance propre. Mais cela implique de ramener la conscience à ce qu'elle fait, à son effectivité sans être sans cesse affaiblie par l'idée de la fin qui contamine l'action de manière virale. "Ni rire ni pleurer mais comprendre" disait Spinoza.<br /> <br /> <br /> <br /> En d'autres termes, optimisme et pessimisme comme humeurs spontanées sont des modes d'appréhension du premier genre. Le pessimisme philosophique est accès à la conscience tragique par la connaissance et l'étonnement devant l'absurdité de la vie, second genre de connaissance. Enfin, l'éthique philosophique ramène la conscience à son déploiement maximal, conscience du présent pur et de l'éternité, position de la sagesse réconciliée avec le Tout de la réalité, ce que Spinoza appelle "la science intuitive" qui n'est pas étrangère à la joie.
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G
Merci pour cette précision .
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P
la raison est ployable à tous sens vient de Montaigne, II, 12, comme souvent on donne à Pascal ce qu'il recopie de Montaigne "J'appelle toujours raison cette apparence de discours que chacun forge en soi; cette raison de la condition de laquelle il y en peut avoir cent contraires autour d'un même sujet, c'est un instrument de plomb et de cire, alongeable, ployable et accommodable à tous biais et à toutes mesures; il ne reste que la suffisance de le savoir contourner"
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