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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
12 janvier 2016

Résumé de l' Apéro-philo du 18/02/16 : Perdre ses illusions ?

Apero philo

L' Apéro-philo (entrée libre et gratuite) s'est tenu le jeudi 18 février 2016 à 18h45 au Café suspendu (café associatif) à Billère (15 rue Lasansaa) sur le sujet suivant : 

Peut-on perdre ses illusions ?

 

Une bien belle soirée, soutenue par un public varié et motivé.

          1)    La question peut paraître saugrenue : qui n’a fait l’expérience douloureuse de la perte d’une illusion ? Reste à savoir si cette perte n’a pas été immédiatement compensée par l’apparition d’une nouvelle. On est amené à se demander si, par delà la variété quasi infinie des illusions (du moi, de l’objet d’amour, du désir, de reconnaissance et de réputation, de puissance et de pouvoir etc), il n’y aurait pas UNE illusion fondamentale, dont la nature et la source nous demeurent relativement impénétrables.

        2)    Qu’est-ce que l’illusion ? D’abord il faut distinguer illusion et erreur : l’erreur peut se rectifier, et disparaître à jamais. L’illusion est difficile à reconnaître et tend à survivre à sa reconnaissance. Le problème est que le sujet, quand il s’illusionne, ne sait pas forcément qu’il s’illusionne. Il y a dans l’illusion une dimension d’inconnaissance, ou de méconnaissance, qui en fait à la fois le caractère trompeur, aliénant (pensons à l’amoureux qui cristallise sur l’objet d’amour tous les charmes de la création, au mépris le plus souvent de la réalité) et cette subtile dimension de séduction qui fait qu’on peine tant à s’en séparer. Perdre l’illusion c’est voir plus juste, mais souvent avec un sentiment de perte, de dépréciation de l’existence, voire de vide.

         3)    Le sujet qui s’illusionne est à la fois actif et passif : actif dans la mesure où il crée de toutes pièces une représentation séduisante ou accablante (cela existe notamment dans la dépréciation systématique de soi), passif là où il vit l’illusion comme une puissance qui s’impose à sa conscience (voire les passions). Je me fais des illusions, et je suis joué par elles.

         4)    Le groupe insiste beaucoup sur le fait que l’illusion est liée à l’affectivité, laquelle apparaît en somme comme sa source : penchants, émois, désirs et besoins. La connaissance strictement dépassionnée, absolument neutre et objective est peut être impossible, jusque dans les opérations les plus rigoureuses de la science. Même le chercheur serait un passionné qui s’ignore. Si le travail scientifique proprement dit est objectif (?), les motivations sont très humaines : pensons à certaines querelles scientifiques qui tournent à l’affrontement passionnel !

         5)    La source de l’illusion est évoquée, mais pas vraiment traitée. Il semblerait que la dominante du groupe ait été plutôt de justifier l’illusion, peut-être par souci de sauver le charme de l’existence, que d’en rechercher méthodiquement l’origine.

         6)    On évoque les expériences de désillusion : perte d’un « bien », mais d’un bien ambigu. Déception, qui permet de voir les choses avec plus de réalisme. Renoncement nécessaire parfois, mais à quoi ? Faut-il renoncer à tel objet illusoire, reconnu enfin comme tel, ou au désir lui-même, avec le risque de sombrer dans le désenchantement ? Là-dessus les avis sont partagés.

        7)    Il serait souhaitable d’apprendre à distinguer le désir de ses objets. Le désir est métonymique : il se déplace d’objet en objet, selon une sarabande bien connue, que l’on peut apprécier soit comme le charme de la vie, soit comme l’expression d’une répétition sans fin (« rien de nouveau sous le soleil ») que Bouddha définissait comme la figure tragique du samsâra.

En conclusion (provisoire, car il serait souhaitable que chacun reprenne cette méditation pour soi-même) deux éléments se dégagent avec netteté : il est difficile voire impossible de vivre sans illusion, mais il importe également de renforcer le travail réflexif et critique de la raison. Si nous avons été des enfants soumis sans partage au règne de l’illusion, ce n’est pas pour rester indéfiniment des enfants. Lucidité, humour et courage sont des vertus nécessaires de l’intelligence.

Animation de la soirée et résumé pour Métaphores, Guy Karl

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Commentaires
A
Un grand arbre , que l'orage rend menaçant , apporte l'enchantement de son ombre ,je la désire , et je la cherche jusqu'à ce que la foudre tombe .Désenchantement ? ou désillusion ? Mais je vais chercher un autre géant pour lui raconter mes chimères,car seule l'illusion me rend le temps suspendu doux comme des rêves qui ne blessent personne , Il suffit de surveiller le soleil et le ciel pour rejoindre le réel .
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T
l'illusion de croire ce que l'on désire n est -ce pas le pire dérèglement de l'esprit ? Ne faut-il pas s'interroger sur l'hétéronomie du sujet ? Pourquoi croire , désirer et s'illusionner ?
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E
La confrontation avec nos illusions et les croyances qui les fondent nous ramène en effet à une nudité .Toutes nos illusions sont comme autant d enveloppes, pour à la fois habiter et nous protéger du réel. Règne de l’incertain, du mouvant, de l insignifiance que nos illusions recouvrent à grands coups de truelle pour nous assurer une densité et solidité sur laquelle s’appuyer. Perdre ses illusions n’est-ce pas aussi accepter d’habiter l’incertain?
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C
Merci à vous 2 Nicole et Guy<br /> <br /> la capacité d'ouvrir des pistes puis de synthèse de iGuy puis l'accueil et la méthode douce de Nicole m'espantent comme on dit par ici<br /> <br /> Claire
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J
désolé de ne pas avoir pu être avec vous jeudi, pour moi les temps actuels sont très difficiles.<br /> <br /> J.Bouveresse a publié il y a quelques années un livre intitulé "Peut-on ne pas croire?" qui me semble vraiment intéressant sur le sujet de l'illusion, et son lien indissoluble à la croyance. Est "illusion" ce que présentement je perçois comme une fiction imaginée réelle dans le passé, mais rien ne me garantit que je ne suis pas actuellement dans une illusion seconde aussi puissante que la première, et même plus puissante puisqu'elle s'accompagne du sentiment fort d'avoir vaincu une première (ou seconde, ou troisième) erreur d'appréciation. Il me semble me souvenir que Bachelard (comme Koyré d'ailleurs) disait qu'une vérité scientifique n'est qu'une erreur rectifiée...`<br /> <br /> Il n'existe pas de "pierre de touche" de la vérité en soi, il me semble que ne nous reste que le sentiment d'adéquation à ce que nous vivons ici et maintenant, et que cette puissance d'assertion si elle ne nous garantit pas d'échapper à l'illusion peut nous emplir d'une plénitude essentielle.<br /> <br /> J'espère à bientôt; J-Y
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