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Métaphores : CAFES-PHILO - CERCLE LITTERAIRE à Pau
12 décembre 2014

Résumé du Cercle littéraire du 08/01/15 : Dostoïevski

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Le Cercle littéraire, présenté et animé par Janine Delaitre, s'est tenu le jeudi 08 janvier, au café-restaurant Chez Pierre (14 rue Barthou, Pau) sur le thème suivant : 

 

 Ombre et lumière chez Dostoïevski 

 

        Fiodor Mikhaïolovitch DOSTOÏEVSKI    (1821-1881)

I)  Présentation

      « Dostoïevski est la seule personne qui m'ait appris quelque chose en psychologie », affirme Nietzsche à propos de ce géant de la littérature russe et mondiale. Son nom évoque aussitôt des titres emblématiques : L' Idiot, Crime et Châtiment, L'Eternel Mari,  Les Frères Karamazov mais aussi Souvenirs de la maison des morts, évoquant les terribles années de bagne en Sibérie ou encore Les Démons.

      Il faut dépasser l'inquiétude que peut susciter l'œuvre de Dostoïevski, réputée sombre et tragique, et oser se plonger dans son univers dense et fourmillant qui prend souvent pour cadre la ville de Pétersbourg, sordide et altière. S'y croisent et se heurtent des personnages inoubliables dans lesquels s'affrontent les grandes passions humaines et s'expriment les questions qui ont sans cesse taraudé l'auteur.

      Figures d'assassins, d'ivrognes, de débauchés à côté de visages purs illuminant la nuit la plus épaisse. Qui l'emporte alors dans cette lutte entre ombre et lumière, or et écorce ? 

 II) Résumé de la soirée  

        La présentation rappelle les moments importants de la biographie de Dostoïevski. Cette vie, digne d'un roman, commence à Moscou entre un père médecin, sévère et violent et une mère tendre. A Saint-Pétersbourg, il fréquente l'Ecole militaire mais ne ressent que peu de goût pour les matières scientifiques et techniques ; il perd très tôt ses parents. Jeune homme réservé et solitaire, il dévore les œuvres de W.Scott, Shakespeare, Sue, Balzac dont il traduira Eugénie Grandet. Une grande amitié le lie à son frère Mikhaïl ; très tôt,le jeune homme se découvre une vocation littéraire. D'abord bien accueilli avec sa première œuvre, Les Pauvres gens (1846), il est ensuite boudé. Ses premières crises d'épilepsie apparaissent (1848) ; il publie Les Nuits blanches sa fréquentation d'un groupe révolutionnaire lui vaut arrestation, simulacre d' exécution (1849) et quatre ans de bagne en Sibérie. De cette période date sa foi très vive.

         Au retour de ses huit années de peine, activités littéraires, vie sentimentale et voyages vont alterner : deux mariages en 1857, puis en 1867 ; des publications : Souvenirs de la maison des morts (1860), Humiliés et Offensés ; la revue Le Temps, (1861), Crime et Châtiment puis Le Joueur (1866) L'Idiot (1868) ; L'Eternel mari (1870) ; des voyages en Allemagne, à Paris, Londres, en Suisse, Italie, au cours desquels il cède au démon du jeu, sans cesse harcelé par le besoin d'argent.  Le retour à Saint-Pétersbourg en 1871 ouvre une période plus apaisée : Dostoïevski ne joue plus. Apprécié du nouvel Empereur, il devient membre de l 'Académie de sciences et de divers comités.  Il publie Les Démons, puis un mensuel, le Journal d'un écrivain, enfin Les Frères Karamazov (1880) , son dernier roman.

           Le projet de Dostoïevski : analyser et résoudre le mystère de l'homme pour devenir lui-même un homme ouvre la discussion. Son univers est peuplé d'êtres en souffrance qui incarnent la misère humaine et sa profonde dualité. Meurtres, suicides, vices, ivrognerie témoignent des tourments qui agitent les figures romanesques de cette œuvre foisonnante. Ainsi, Douce raconte le mariage d'un vieil homme fortuné et d'une jeune fille qui finit par se suicider. Le crime, mystérieux et injustifiable, est un thème récurrent. Le meurtre de la vieille usurière par Raskolnikov, n'est pas mis au service des idéaux qui semblent le motiver. Le film de Woody Allen, Match Point est convoqué pour évoquer la complexité de ces motivations.

          On remarque que l'univers de Dostoïevski présente de violents contrastes entre les situations et les personnages, au plus profond d'eux-mêmes. Le pouvoir occupe une place majeure dans les relations entre les gens ; la violence physique, verbale, morale est omniprésente. Cet aspect est particulièrement visible dans Les Frères Karamazov, unis dans leur haine pour leur père. Certaines scènes récurrentes la traduisent : la scène du cheval battu à mort pleuré par un enfant, scène vécue par l'auteur dans sa jeunesse, que l'on retrouve chez Nietzsche (Turin 1888). La culpabilité et la souffrance forment un couple indissociable ; mais la souffrance peut-elle éponger la culpabilité ? Dans cet univers de ténèbres, la lumière naît souvent de figures féminines : Sonia, Lisa figures angéliques de bonté et de pureté. Mais ces personnages ne sont pas dénués d'ambiguïté. Sonia se prostitue, une part de perversion se glisse dans certains personnages enfantins.

          Autre hantise repérée et analysée par Freud : le désir de parricide qui se révèle dans l'épilepsie du romancier : deux phases se succèdent lors de ses crises : un sentiment de triomphe peut-être lié à l'assouvissement de la pulsion, suivi d'une retombée. On retrouve cela dans le jeu, Dostoïevski s'appliquant à tout perdre comme pour mieux s'humilier et retrouver ensuite l'énergie créatrice.

          Le bouddhisme comme le christianisme soulignent que l'on peut sortir de la souffrance en invitant à en rechercher la cause. Car c'est l'ignorance qui nourrit la souffrance. La douleur est sublimée dans la création ; mais l'écriture ne le sauve pas. L'oeuvre de Dostoïevski sonde magistralement l'âme humaine, les ressorts subtils et secrets qu'elle met au jour habitent des personnages marquants ; ténèbres de l'âme humaine mais une espérance cependant, à l'image de l'amour absolu qui sauve Raskolnikov, rédemption lumineuse présente dans tous les romans.

                   Pour "Métaphores", JD

Les commentaires sont les bienvenus.

 

Pour découvrir la dernière soirée du cercle littéraire, cliquez ici.

Pour en savoir plus sur le projet et le fonctionnement du Cercle littéraire, cliquez ici

 

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Commentaires
G
Très belle soirée, fort bien animée par l'excellente Janine ! De quoi méditer, avec Dostoïevsky sur les causes de la souffrance : fantasmes de crime, sentiment de faute inexpugnable, culpabilité, autopunition, avec l'espoir lancinant d'une rédemption qui se dérobe... Quel cocktail ! Et comment sortir de cet enchaînement fatal? La jeune fille entrevue, sainte, prostituée et sacrifiée, suffit-elle à sauver le héros, l'anti-héros de cette funeste dramaturgie ? Seule l'écriture, enfiévrée et tourbillonnaire, semble pouvoir offrir un remède, à défaut du salut impossible.<br /> <br /> A méditer décidément. Mais quel génie de la psychologie humaine !
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